Le début de Jusan no jo et le début de Sanju ichi no jo ont un point commun.
Dans ces deux séquences il existe en effet une frappe avec le jo qui paraît inutile. Dans les deux séquences, le jo frappe à un moment le jo d’uchi d’une manière qui semble curieusement redondante.
De fait, si l’on considère que ces exercices sont la forme d’étude d’un combat singulier, alors effectivement il n’y a pas de sens à frapper deux fois de suite le jo d’uchi dans une circonstance unique. Cette répétition serait incongrue dans un tel contexte.
En toute logique, et si les étudiants en Aikido avaient un peu de foi dans l’enseignement qui leur est proposé, cette étrangeté de premier abord, ce bégaiement inattendu du jo, devraient les faire réfléchir, et devraient apparaître peut-être comme un indice précisément qu’il ne s’agit pas d’un combat singulier.
Or c’est l’exact contraire qui se produit : l’apparence de l’exercice d’étude donnant l’illusion qu’il s’agit d’un combat singulier, l’a priori se forme qu’il s’agit bien d’un combat singulier, et puisque c’est un combat singulier alors les frappes en question sont superflues.
Le pas ensuite est vite franchi : puisque ces frappes sont superflues, il convient bien entendu de les supprimer.
Si le postulat est faux, c’est par une logique rigoureuse que l’on parvient à l’erreur.
Mais cette erreur malgré tout serait impossible si elle n’était pas en même temps la conséquence d’un manque total d’humilité. Voit-on bien en effet l’orgueilleux aveuglement qui est nécessaire pour qu’un individu à la compréhension nécessairement limitée s’imagine en position et en capacité de percevoir et de corriger les imperfections éventuelles d’un enseignement traditionnel ?
Les hommes qui se lancent dans ce genre d’entreprise font en réalité la preuve d’une myopie à renverser les taupes et d’une arrogance désinvolte, qui mènent tout droit à l’oubli de la connaissance authentique et à sa perte.
L’attitude juste n’est pas de rejeter et de modifier ce que l’on ne comprend pas dans l’enseignement des origines, mais de l’accueillir avec respect, modestie, et gratitude, pour en faire le marchepied d’une clairvoyance future, et à tout le moins de le conserver et de le transmettre sans y rien changer.