Je reviens aujourd’hui sur un article publié en septembre 2018 sous le titre Spirale intérieure ou spirale extérieure, et j’utilise la même vidéo qui explique un point fondamental, je crois, pour la compréhension de l’Aikido :

Il y a bien des milliers d’années que l’homme connaît les spirales. Dans ces temps reculés, il en avait vraisemblablement une compréhension moins extérieure que celle héritée bien plus tard d’Archimède et de Fermat :

L’approche mathématique des spirales permet à la science d’en donner une explication qui satisfait essentiellement deux exigences de l’homme : sa curiosité d’esprit, et son appétit de pouvoir sur la nature via la maîtrise technologique. Mais ni l’une ni l’autre de ces exigences ne permet à l’homme d’évoluer quant à sa conscience. Il ne suffit pas en effet que la raison soit satisfaite pour que progresse la conscience. 

Un "objet d’étude" demeure extérieur au sujet qui pense, quelle que soit la sagacité de ce dernier. Pour qu’une transformation puisse être opérée, pour qu’une évolution soit possible autrement que cosmétique, l’homme doit trouver le chemin du principe fondamental (arkhè dans la Grèce antique) dont toutes choses émanent, et qui parle de l’unité du monde sous son apparente diversité.

Il n’est pas facile d’avancer sur ce chemin, mais les sociétés passées nous ont laissé des symboles qui sont autant de jalons dans la recherche de la connaissance objective. C’est en effet le rôle du symbole de nous donner accès à une conscience objective du monde. Car l’homme est en mesure de retrouver, par l’étude de soi, les lois fondamentales de l’univers. Cette possibilité existe en vertu de l’analogie qu’il y a entre le macrocosme et le microcosme. "Connais-toi toi-même" était un principe inscrit au frontispice du temple de Delphes, et Pythagore y ajouta "Connais-toi toi-même et tu connaîtras l’Univers …"

La piste qui permet de remonter de la multiplicité au principe unique est celle de la dualité. Tous ce qui survient dans le monde des phénomènes a en effet son origine dans la combinaison variée à l’infini de deux principes à la fois opposés et complémentaires (les Chinois les nommèrent yin et yang). Cette dualité première, l’homme doit bien sûr en faire l’expérience par son esprit, mais il faut pour cela que son corps comprenne auparavant comment on peut remonter de la dualité à l’unité. C’est cette route que propose l’Aikido. Sur cette route, le symbole ne s’adresse pas seulement aux qualités intellectuelles de l’homme, il lui est donné pour qu’il en fasse l’instrument corporel concret de son édification et de son évolution.

On réalise alors comment la double spirale extérieure et intérieure, exécutée par les deux hanches dans le mouvement d’Aikido, est une dualité et une complémentarité tangible, qui permet de sentir et de comprendre avec le corps l’unité du principe de rotation.

Les deux spirales exécutées par les hanches tournent dans le même sens, mais l’une est tenkan et l’autre est irimi. Le moyen, l’outil de compréhension du principe irimi-tenkan, est le corps, et le corps ensuite informera l’esprit. Je rappelle ce logon des manuscrits de la Mer Morte que j’ai déjà cité : "Si le corps est par l’esprit c’est une merveille, mais si l’esprit est par le corps c’est la merveille des merveilles…"