TAI SABAKI projette

Tori ne se déplace pas pour se mettre dans une position favorable, à l’abri, cette position favorable lui permettant ensuite de projeter uke.

Il est tout à fait vrai que le déplacement permet de rétablir une situation compromise, de la renverser à l’avantage de tori, et de le mettre à l’abri, c’est d’ailleurs la définition de tai sabaki : remettre par le corps de l’ordre dans une situation perturbée.

Mais c’est là une fonction seulement du déplacement. Il y en a une deuxième tout aussi importante : le déplacement est ce qui fait chuter uke. Par le déplacement, le corps pénètre la sphère d’uke tout en détruisant son équilibre, la chute ou le contrôle suivent. Ce qui veut dire qu’au terme du déplacement, la technique d’Aikido ne reste pas à faire, elle est terminée. La vidéo montre cela :

La technique prendra bien sûr une forme différente en fonction de certains choix secondaires faits par tori : ikkyo ou shiho nage, nikyo ou kote gaeshi, sankyo ou kaiten nage etc., mais c’est à chaque fois le déplacement qui - fondamentalement - produira la technique, sans qu’on puisse expliquer l’essentiel de celle-ci par le choix accessoire de tel ou tel type de saisie. Cette vérité prend un sens plus fort encore avec les armes.

Il y a dans ce constat une piste non négligeable pour comprendre le sens de la phrase souvent répétée mais jamais expliquée véritablement : "en Aikido il faut parvenir à oublier la technique".

Qu’on veuille bien réfléchir également, à l’occasion de cette explication, à un point que j’ai déjà évoqué. Le déplacement de l’Aikido (tai no henka) permet de conjuguer de manière parfaite deux exigences qui ne semblent pourtant pas dépendre l’une de l’autre : la sécurité maximale de tori, et son efficacité maximale. Des coïncidences sont toujours possibles évidemment, mais la conjonction systématique - au moyen d’un déplacement unique et quelles que soient les circonstances de l’attaque - de deux nécessités sans lien entre elles au premier abord, est tout à fait remarquable et devrait questionner la raison.