Dans ce mouvement, la saisie du poignet d’uke est un point qui mérite un peu d’attention.

En effet, quand l’action est exécutée en ligne, c’est-à-dire à 180°, cette saisie du poignet n’est pas nécessaire car uke n’a pas la possibilité d’échapper à la projection. Pourquoi alors, dans un art comme l’Aikido où rien ne se fait sans raison, la méthode enseigne-t-elle de saisir le poignet ?

Parce qu’il s’agit là d’un indice, un des petits cailloux laissés scrupuleusement par maître Saito sur le parcours de sa méthode d’enseignement, pour que ses élèves ne s’égarent pas et retrouvent le chemin qui mène à l’Aikido d’O Sensei.

En effet, dès que l’on passe des 180° de la méthode au déplacement spiralé d’O Sensei, le nouvel angle atteint par tori est de 270°. Nous savons désormais que ces 90° degrés supplémentaires sont indispensables à chaque fois pour deux raisons principales :

  1. – créer le déséquilibre d’uke,
  2. – disparaître du point de convergence des attaques multiples.

Mais dans ces 90° supplémentaires, uke a désormais la possibilité de lâcher le poignet de tori et de rompre le maai, rendant ainsi la projection impossible. C’est pour empêcher cette possibilité, et conserver jusqu’au bout le contrôle du bras d’uke et du maai, que tori doit impérativement saisir le poignet d’uke.

Ainsi, une saisie, qui n’est absolument pas nécessaire au mouvement tel qu’effectué dans le cadre de la méthode, y est néanmoins enseignée parce qu’il s’agit d’une condition sine qua non du mouvement réel.

Il faut comprendre ce genre de choses si l’on veut comprendre l’enjeu de la méthode mise au point par maître Saito. Bien souvent, certaines anomalies, certains détails d’exécution incompréhensibles, certains points obscurs de la méthode, trouvent ainsi leur explication quand on passe du mouvement d’étude au mouvement véritable.

Philippe Voarino, mars 2017.