Dans l’enseignement de la méthode, muna dori kokyu nage est enseigné selon une double rotation : une première rotation à 180° pour déséquilibrer uke, et immédiatement après une seconde rotation à 180° pour le projeter.

C’est un excellent exercice qui apprend à mobiliser les hanches, et aussi à les stabiliser dans le temps de la projection.

Mais cet exercice comporte plusieurs difficultés :

  • il est irréaliste avec un uke qui tient solidement, parce que la course insuffisante des hanches de tori l’oblige à déséquilibrer uke dans l’axe de sa jambe d’appui,
  • il oblige tori à « aller vers uke » au moment de la projection, alors que c’est le contraire qui doit se produire : uke doit être mis en mouvement autour de tori comme l’hélice autour de son axe, et tomber par l’effet de sa propre dynamique,
  • il est irréalisable dans le contexte d’une attaque de groupe, car il laisse tori exposé et vulnérable.

Ces problèmes ne trouvent pas de solution dans le cadre de la méthode, qui ne peut donner, comme la plus belle fille du monde, que ce qu’elle a.

Pourtant la solution existe, mais elle exige que l’on comprenne quelle différence fondamentale il y a entre la pratique d’un exercice d’étude et le mouvement réel.

Cette différence se mesure mathématiquement, et c’est un angle de 90° : quand la méthode demande d’exécuter la première rotation à 180°, la réalité exige en effet de l’exécuter à 270°.

Seuls ces 90° supplémentaires permettent de respecter les points essentiels ci-dessous :

  • opérer la rotation initiale des hanches avec une amplitude telle (270°) qu’elle développe une puissance considérable dans la mise en mouvement et en déséquilibre d’uke,
  • exécuter cette rotation dans le déséquilibre latéral d’uke, c’est à dire là où il est faible, et non plus dans l’axe de sa jambe d’appui où il est particulièrement solide
  • déséquilibrer uke vers l’un des deux adversaires latéraux (gauche ou droit selon la saisie)
  • projeter uke vers les deux adversaires restants

Une technique d’Aikido doit fonctionner aussi bien avec un adversaire qu’avec quatre, sans qu’il soit nécessaire pour cela de la modifier. Ceci est l’enseignement d’O Sensei, il est essentiel de le comprendre et de le respecter. La compréhension de ce qui est en jeu ici passe par la compréhension de l’angle à 270°.

Philippe Voarino, juin 2016.