Ceci est la dernière vidéo sur l’exercice qui porte le nom de ni no tachi dans la méthode de maître Saito, on y trouvera ce qu’il faut entendre par « principe irimi-tenkan ».
Explication du principe irimi-tenkan
Irimi et tenkan sont deux termes contraires mais qui ne s’opposent pas : ils sont complémentaires. Ce sont eux qui ensemble définissent la rotation de l’Aiki.
L’image de ce principe est donnée par la mobilité synchronisée de la hanche droite et de la hanche gauche, que l’on peut résumer ainsi : quand la hanche droite tourne vers l’avant, la hanche gauche tourne vers l’arrière, et inversement quand la hanche gauche tourne vers l’avant, la hanche droite tourne vers l’arrière.
Il est difficile de se représenter ce que je vais dire maintenant, mais c’est pourtant la réalité : c’est parce que l’axe central est immobile que le corps humain peut se mettre en rotation autour de cet axe. C’est, ici rapporté aux mouvements du corps humain, ce que la tradition taoïste appelle le moteur immobile de l’action. En d’autres termes, si les hanches se mettent en rotation complémentaire, c’est parce que le vide médian par lequel elles sont unies est immobile. Ce vide occupe le centre même de la colonne vertébrale, son cœur, et il est l’origine du mouvement d’Aikido.
Il y a également un point plus concret et fondamental, dont la compréhension est de toute première importance : cette mise en rotation des hanches est possible seulement à partir de la position hanmi (roppo), mais elle n’est pas possible en position hanmi. En effet, s’il est entendu que la position triangulaire est indispensable pour que puisse être initié un déplacement instantané dans les six directions (et c’est bien pour cette raison justement que son nom, roppo, signifie six directions), en revanche dès que le premier pied (avant ou arrière) bouge en rotation à partir de la position triangulaire, la figure au sol prise par les pieds est celle d’un carré. Cette réalité physique est énoncée, sur le plan du symbole, par l’idée que le triangle qui se met en rotation devient carré.
Ceci explique pourquoi toutes les photos d’O Sensei prises au moment de l’action le montrent dans une position de pieds carrée, et jamais dans une position triangulaire, alors que toutes les photos prises au départ ou à la fin de l’action le montrent au contraire dans un hanmi impeccable.
Or c’est seulement quand les pieds sont en carré que la rotation des hanches en complémentarité est rendue possible. Dans la position hanmi, les hanches sont au contraire bloquées du fait de la position triangulaire (sankaku) des pieds, et leur rotation est empêchée.
Il se trouve, et nous l’avons vu (cf. « Au-delà de la méthode #1 », que l’exercice linéaire d’avant en arrière exige justement - dans le cadre de l’étude purement formelle de la technique - que le corps soit en position hanmi au moment de chaque action.
Voilà pourquoi le principe irimi-tenkan ne peut pas encore apparaître dans le travail en ligne. Le principe irimi-tenkan ne peut apparaître que dans la rotation des pieds en carré dans le cercle des quatre directions. Comme cette mise en mouvement des pieds en carré n’est par ailleurs possible qu’au départ de la position triangulaire hanmi, qui en est l’origine et aussi le point de retour, on vérifie bien que l’Aiki Takemusu ne peut apparaître, selon les propos mêmes du Fondateur, qu’à partir du moment où le triangle, le carré et le cercle sont unis dans une rotation commune.
Philippe Voarino, juin 2015