Le kumitachi n°5, tel qu’il est donné à l’étude dans la méthode d’enseignement, n’a pas été construit ainsi par hasard.

Il y a des raisons pour qu’il soit ce qu’il est. Passer de l’exercice d’apprentissage à la réalité du mouvement ne signifie pas qu’il faille pour cela modifier quoi que ce soit au modèle proposé.

C’est tout le contraire : il faut, dans la réalité martiale circulaire du mouvement, respecter scrupuleusement chaque figure imposée par l’exercice pédagogique linéaire. Si on change la base, on perd le fil et la compréhension du mouvement réel. Il faut se contenter d’appliquer en rotation dans un cercle ce que la méthode propose d’étudier sur une ligne exclusivement.

Pour donner un exemple vidéo à l’appui, la toute première frappe de l’adversaire de gauche avec le pommeau du sabre est un uppercut lié de manière naturelle (ou biomécanique si l’on veut) à la montée du sabre pour l’exécution du yokomen. Si l’on transforme ce mouvement naturel d’uppercut inclus ou inscrit dans le yokomen, en un tsuki linéaire en translation, on quitte le fil directeur de la méthode, on introduit un mouvement qui n’existe pas dans le kumitachi-suburi, et au lieu d’un seul yokomen au sein duquel coexistent une frappe avec le pommeau et une coupe avec la lame, on a désormais deux mouvements distincts, un tsuki et un yokomen. On ne peut plus comprendre.

Il faut absolument coller au modèle proposé par la méthode, ne jamais oublier que maître Saito avait la connaissance du mouvement martial réel en rotation, et qu’en partant du mouvement spiralé pour mettre au point sa pédagogie linéaire, il a scrupuleusement conservé le mouvement authentique, se contentant de le réduire du cercle à la ligne.

C’est précisément parce qu’il n’a rien modifié de ces mouvements qu’il nous est possible aujourd’hui de faire le chemin inverse du sien, et de revenir de la méthode à la réalité du mouvement, c’est à dire à l’Aikido. C’est ce qu’il souhaitait, c’est le but de sa méthode, et c’est le sens de sa vie consacrée à l’Aikido.

Philippe Voarino, août 2016.